July…
… where another one bites the dust !
Samedi soir, une équipe d’émeutiers inspirés par la guérilla urbaine qui agite la France depuis le mort de Nahel, a déboulé vers 22h00 dansle quartier du Flon, à Lausanne, pour tenter de mettre à sac quelques enseignes.
Comme par hasard, les cagoulés de circonstance ont ciblé les vitrines qui les attire quand il fait clair, la FNAC, Pump It Up…
Il n’y a aucune corrélation possible entre les Cités et notre Helvétie. Du
moins pas ici. Ceux qui l’ont prétendu, ne l’ont fait que dans un seul but : en
exciter d’autres pour semer le chaos. L’anarchiste moderne ne vise plus les
têtes couronnées à coups de bombe artisanale. Il va faire ses courses hors des
heures d’ouverture chez Darty, en cassant tout sur son passage, au nom de la
Justice sociale. Enfin, c’est ce que certains petits malins lui ont susurrer à
l’oreille des réseaux sociaux…
Bien sûr, il faudra défendre ici aussi ces jeunes casseurs inspirés. L’exercice
pourrait même être intéressant. A la question pourquoi avez-vous participé,
quelle sera la réponse ? Comme chez nos voisins, un leitmotiv qui transpire la
leçon apprise, toujours via les réseaux : je me suis laissé entraîner dans
l’euphorie du moment !
Un seul osera-t-il affirmer qu’il est venu et en a entraîné d’autre au nom
de cette fichue justice sociale ? Y en aura-t-il un pour dire par quels canaux
est-il arrivé là et comment a-t-il été recruté ? Que lui a-t-on expliqué ou
promis ?
C’est peut-être un peu réducteur comme présentation, mais on ne m’ôtera pas
de l’idée qu’il y a derrière ces événements qui ont débordé des frontières ce week-end, comme dans les banlieues de l’Hexagone, des gens qu’on ne voit pas et qui attise cette haine, parce qu’elle leur profite politiquement ou économiquement.
Quelques mois plus tard, quand il se retrouve au Tribunal avec son casseur
de client, l’avocat est souvent réduit à plaider seulement la bêtise comme
circonstance atténuante. Et l’argument n’est pas infondé. Mais bon, dommage quand même. L’exercice serait plus intéressant (et plus riche en enseignements aussi pour la société), si le prévenu avançait comme justification de son acte une idéologie, même simpliste, une explication plutôt tournée sur son ressenti en tant qu’individu et non sur le fait qu’il voulait des baskets neuves et qu’il a suivi ses
copains…
Là, nous pourrions relire Vergès et sa Stratégie judiciaire pour y
puiser quelques inspirations plus élevées que de conseiller – à juste titre
quand même – à son client de s’excuser devant le juge et d’admettre les
conclusions civiles du commerçant lésé.
Le 6…
… où l’on demande par retour de mail au client si la lettre, en format Word, qu’il vient de nous envoyer, sans aucun commentaire, est bien un projet. Parce que son contenu est, comment dire, inadéquat sous cette forme, inapproprié à ce moment précis, et surtout inutile, parce qu’elle sera classée verticalement par son destinataire.
Réponse : Non, je l’ai envoyée à l’instant.
Soupir….

Le 11…
… où il y a des jours, comme ça, où tout nous afflige et nous nuit et conspire à nous nuire.
Le « nous » n’a ici rien de majesté. Nous, c’est bien toute la FaireCave, et, en particulier, Me Isotta et Me Mulan qui reçoivent en même temps que votre serviteur 5 ordonnances supplémentaires de séquestres, qui viennent compléter les 3 reçues la semaine dernière et qui vont donc contribuer à les faire suer ces prochains jours. Comme si le mercure n’était pas déjà assez bouillant.
Remarquez, on s’y attendait un peu après le premier trio de salve. La facétieuse (pour rester poli) partie adverse qui en veut à ce point à notre client, et son non moins espiègle mandataire qui s’est visiblement mis en mode « repeat louder and louder », avaient visiblement gardé le meilleur pour la fin.

Donc, 10 jours pour déposer oppositions et plaintes. Top départ ! Eh non, il n’y a pas de féries judiciaires en la matière. Il y en a qui vont apprécier dans les tribunaux de la Comté…
Le 13…
… où il y a la gestion du dossier bien sûr, mais celle du client peut s’avérer parfois tout aussi compliquée.
C’est vrai qu’on ne peut pas complètement en vouloir à celui qui reçoit en quelques jours huit ordonnances de séquestre. Il ne sait forcément plus à quel saint se vouer, cherche le salut dans toutes les directions et les conseils de son avocat ont des effets plus qu’éphémères. Il change d’avis plus vite que de polos (fait trop chaud pour les chemises), surtout lorsqu’il croit naïvement avoir trouvé tout seul la solution.
Et, là, paf, le mail à 3h23 du matin : j’ai lu la loi, il faut faire ça ou il faut tout arrêter, on m’a dit de faire comme ci.
-Ah oui, et c’est qui « on » ?
–Un ami, mais il connaît bien le domaine.
–Et il a eu tout le dossier en mains votre ami. Non, bien sûr, puisqu’il faut un camion pour le transporter. Alors, vous lui avez raconté toute l’histoire en détails ?
–Ben, je lui ai dit que j’ai reçu des ordonnances de séquestre…
–Eh c’est tout ?
–Euh, à peu près…
–Bon, si vous vous asseyiez et qu’on parle un peu tranquillement.La situation est effectivement très compliquée, mais elle obéit aussi à des règles juridiques très précises et, si on les oublie ou qu’on essaie de les contourner sans réfléchir, on court à la catastrophe.
–D’accord, je vous fais confiance.
–Merci.
Le 14…
… où, pendant ce temps, alors qu’on s’alimente d’une magnifique entrecôte puisqu’il faut bien prendre des forces en ses temps troublés par les séquestres, on entend fortuitement une conversation à la table d’à côté : toutes ces racailles de gamins qui viennent casser en ville pour le plaisir, y a qu’à faire comme Macron il a dit, faut faire payer les parents !
Bon sang, mais c’est bien sûr ! Voilà La solution imparable à notre problème de société. Sauf que, d’abord, ce brave Président de l’Hexagone n’a rien découvert tout seul. Cette théorie n’est pas nouvelle. Et elle ne va pas forcément de soi.
Explications.
D’abord, les braves gens ne voient que la finalité : la condamnation sociale au travers de la sanction pénale. Alors que punir les famille de délinquants mineurs est une question juridique qui relève plutôt du droit civil. Et quand bien même, la « méthode Macron » se heurterait tout d’abord à des difficultés pratiques.
La première est que seuls quelques délinquants se font en général attraper sur l’ensemble des casseurs et encore moins passent devant le juge. Donc, une minorité paierait pour la majorité. C’est déjà discutable. Mais ce n’est pas tout.
Si l’on part du principe – parce que c’est ça l’idée, il ne faut pas se leurrer – que l’on aura majoritairement parmi les ces jeunes trublions des enfants de familles « à problème » (trad. : déjà assistées), il faudrait donc qu’il y ait une communication obligatoire des condamnations pénale aux services sociaux, à qui on donnerait le pouvoir de réduire par ricochet les prestations en guise de sanctions, pour n’avoir pas su ou pu empêcher leurs rejetons de commettre des déprédations. Sauf que, en l’état actuel du droit, les prestations de l’aide sociale ne dépendent pas du bon comportement des enfants.
Il faudrait déjà qu’il y ait une base légale qui n’existe pas (et ce n’est pas pour demain). En plus, à l’aube de la nouvelle loi sur la protection des données, une telle transmission d’informations sensibles (lesquelles, par qui, qui a accès, etc…), il y aurait une sacré contradiction dans les pratiques d’un service de l’État à l’autre.
En plus, en droit pénal, la sanction ne s’applique qu’à l’auteur ou aux autres participants. Pas à la famille, même si elle a failli à ses devoirs éducationnels. C’est le principe même du droit pénal. Faire payer les proches, c’est une justice d’un autre temps en d’autres lieux. Cela donne de bons scenarii pour la littérature ou le cinéma, mais ce n’est pas acceptable dans un État de droit.
Et, si on a bien compris le Président français, son idée impliquerait un certain automatisme dans la mesure de rétorsion, chaque fois qu’un mineur serait appréhendé et condamné. Ce qui serait à nouveau contraire à notre système qui veut que, avant d’être l’objet d’une décision, on doit être entendu pour pouvoir s’expliquer.
Donc, sous l’angle du droit pénal, la méthode Macron n’est pas applicable chez nous. Et pas d’avantage dans l’Hexagone d’ailleurs, ce qui en dit long sur sa connaissance de son propre système.
Si cela peut rassurer certains, même si le droit pénal (suisse) ne permet pas cette « solution » contre la violence urbaine, notre petit système légal a tout de même un outil pour aller demander des sous aux parents des mineurs ayant causé des dégâts. C’est là qu’on atterrit dans le droit civil.
L’art. 333 de notre Code civil prévoit que le chef de la famille est responsable du dommage causé par les mineurs placés sous son autorité, à moins qu’il ne justifie les avoir surveillés de la manière usitée et avec l’attention commandée par les circonstances.
« … à moins qu’il ne justifie…« , nous avons donc quitté le terrain du droit pénal pour celui du privé. Il n’y a plus de Procureur pour faire le boulot et fustiger les lacunes dans la nécessaire discipline familiale. Ce sera à celui qui a subi le dommage d’apporter la preuve que, si le bon papa ou la vaillante mère, avaient correctement fait leur boulot de parents, la vitrine n’aurait pas été fracassée par leurs chers bambins.

L’exercice est loin d’être infaisable. Si une condamnation par la Justice des mineurs est intervenue, l’action en responsabilité contre le chef de famille sera grandement facilitée. Il faudra bien sûr encore montrer le défaut de surveillance. Bon, certains adeptes de Dolto vont hausser un sourcil, mais la plupart des juristes en terrain judiciaire considère qu’un mineur, arpentant en bande organisée les rues d’une cité qui n’est pas la sienne, passé le couvre-feu social, soit la fin des journaux télévisés, est un vibrant exemple de ce défaut de surveillance.
Moralité : Macron ne ferait pas un meilleur chef d’État en Helvétie et les journalistes ne parlent pas assez de l’art. 333 CC.
Le 15…
… où, tradition oblige, nous sommes le 15 of July.
MeFaire goes surf, et jusqu’au 15 août siouplaît.

Selon l’arrêté préfectorale du 14 thermidor, les féries judiciaires s’appliquent aussi aux blogs d’utilité publique, citoyen.
Bon été à tous mes followers, merci de votre fidélité et au plaisir de vous retrouver pour de nouvelles aventures dans un mois.

Me Faire pour président ? 🏀
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