Octobre…

… où les sanglots longs des violons de l’automne viennent chatouiller notre robe d’une langueur monotone.

Le 2…

… où l’on assiste devant le Procureur un jeune client étranger dont il faut examiner la question de son éventuelle expulsion de la Suisse, au vu de son parcours de délinquant, dans lequel il a mis une énergie toute particulière. Dès qu’on a franchi une certaine limite, la Justice doit examiner la question de l’expulsion, d’où notre présence dans la salle d’audience de Ministère public, ce lundi matin.

Notre bonhomme purge déjà une peine de 4 ans pour différents délits, allant du brigandage aux stups, en passant par diverses bagarres et autres occupations sociales nocturnes. Son père est aussi en prison, ce qui bien évidemment n’arrange pas le tableau. Reste sa mère et ses quatre frères et sœurs, tous en Suisse et qui se tiennent plus ou moins à carreau.

Vous avez de la famille au pays ? demande le Procureur.

Quelques oncles et tantes, mais on n’a pas trop de contacts…

Vous parlez bien la langue ?

Moyen…

Et vous voulez faire quoi quand vous sortirez de prison ?

J’sais pas, j’ai pas trop d’idées là-dessus, mais vous pouvez arrêter avec vos questions,  vous pouvez me renvoyer, moi aussi je veux partir…

Ah bon ? Mais réfléchissez bien. Si vous êtes expulsé, plus question de revenir voir votre sœur qui aurait eu un enfant et qui vous vous voudrait comme parrain. Et si votre mère serait au plus mal à l’hôpital en Suisse, vous ne pourriez pas venir la trouver. Vous vous rendez compte ? De toute manière, vous faites ce que vous voulez quand vous sortirez. Vous pouvez partir si ça vous chante. Mais, si vous êtes expulsé, plus question de revenir !

Je sais, mais ça fait rien, j’ai pris ma décision…

Il repart entre deux gendarmes, pas plus affecté que ça. Jouer les caïds, c’est une chose. Mais un tel détachement… Le procureur me regarde décontenancé, jamais vu ça…

Le 3…

… où l’on se retrouve entre le marteau et l’enclume.

D’un côté, un client avec une histoire compliquée de refus de prise de sang dans des circonstances qui restent plausibles. De l’autre, un rapport de police où l’on force manifestement le trait pour justifier une intervention qui aurait pu n’être qu’un simple contrôle de routine et qui se transforme en constat d’accident, alors que, d’accident, il n’y en a pas eu, juste un pneu crevé. Ici ou ailleurs ? Difficile à dire.

Très futés, les pandores ont demandé une analyse ADN des traces sur le volant pour confondre le conducteur qui prétend qu’un tiers dont il ne connaît ni le nom ni l’adresse l’a conduit jusqu’ici.

Et l’analyse ADN confirme  – de manière tout à fait étonnante ! – que cette voiture a été conduite par plusieurs personnes…

Veritas, veritatis et omnia veritas !

Le 4…

… où notre courrier de la veille envoyé au Tribunal pour informer la Cour que notre cliente est décédée et qu’il faut suspendre la procédure, le temps de régler quelques questions de succession, croise celui de son Président, qui a lu la rubrique nécrologique du canard local, et nous demande s’il faut suspendre la procédure, le temps de savoir ce qu’il se passe avec la succession !

Pour une fois que nous sommes d’accord !

Le 5…

… où nous assistons, avec Me Granadina, une dame âgée, absolument charmante, qui a été blessée dans un accident dû à une défectuosité du bâtiment dans lequel elle effectuait ses courses. D’origine russe, elle a en outre un charmant accent, roulant les « rrr » et dans le couloir des pas perdus, elle nous raconte quelques épisodes de sa vie mouvementée.

Malheureusement, la séance de conciliation n’a pas permis pas de trouver une solution, au grand dam du Président, dont l’empathie fait souvent des miracles dans ce genre d’exercice. Eh, les propriétaires de l’enseigne, visiblement convaincus d’avoir affaire à une vieille gâteuse, non seulement lui ont offert un pourboire en guise de dédommagement, mais voulaient même lui imposer une clause de confidentialité quant à l’indemnité offerte !

Nous sortons du Tribunal un brin dépités, avec notre cliente un peu triste, mais résolue à ne pas se laisser faire.

Quelle dommage ! J’espèrrrrais avoirrrr chance de finirrr aujourrrd’hui. J’avais même prrrrèvou petit cadeau pourrr vous rrremerrrcier. Je vous donne quand même.

Et c’est ainsi que MeFaire & Padawan Granadina sont repartis du Tribunal avec deux bouteilles de vodka !

PS : procédure russe (allégorie)

Le 6…

… où la presse relaie les menaces de mort, visant ses enfants, reçues par notre Confrère Dupont-Moretti, dans le cadre du procès d’Abdelkaker Merah, qui se tient devant une Cour d’Assises « spéciale »

EDM, très ému, a précisé en audience que son cabinet ne perçoit pas un centime dans le cadre de ce dossier, pas même l’aide juridictionnelle. Il a aussi rappelé l’opprobre jeté sur d’autres avocats dans des dossiers déchaînant la vindicte populaire : Isorni (avocat de Philippe Pétain), Badinter (avocat de Patrick Henry), ou Leclerc (brutalisé lorsqu’il défendait un homme accusé à tort d’avoir tué une fillette). «Un site a été créé sur Internet, intitulé Dupond-Moretti va manger cher, poursuit-il. Nous vivons dans l’une des plus anciennes et des plus belles démocraties du monde. Personne ne peut remettre en cause le fait qu’on puisse défendre un homme. Je défends Abdelkader Merah, pas une cause, et c’est un honneur. Je ne me suis jamais senti autant avocat qu’aujourd’hui».

On constate donc que le public confond toujours l’avocat et l’homme qu’il défend, croyant que le premier ne peut défendre le second qu’en devenant son complice. L’honneur de la profession est cher payé quand des esprits éclairés pense être au-dessus du monstre qu’ils décrient, souvent à tort, en s’en prenant à des enfants. Même si ce ne sont que des menaces diront certains lâches, le seul fait de les proférer relègue leurs auteurs dans cette absence d’humanité qu’ils reprochent à celui qui est assis sur le banc des accusés…

Le 9…

… où c’est un jour de tristesse depuis l’annonce du décès de Monsieur Jean Rochefort, car, oui, c’était un Mônsieur dont la classe, l’élégance et cette touche d’humor (prononcez « youmaure ») éclairait le monde des arts.

Hommage

Le 10…

… où l’on explique à nos chers padawans qu’on ne dit pas « vision locale« , lorsqu’on requiert du Juge de transporter son Tribunal sur le lieu du litige, mais « inspection locale« . En effet, comme disait un Président éminemment craint : Ce sont les saints qui ont des visions ! Vous ne vous prenez pas pour un saint tout de même ?!?

Le 11…

… où Me Granadina s’en revient avec l’anecdote du jour.

Nous sommes au Tribunal, où se juge une affaire de violence conjugale aggravée. L’épouse, partie civile aux déclarations fluctuantes, se voit mettre un peu sur le grill par la Présidente qui tente de comprendre :

Madame, vous prétendez donc que votre époux a tenté à sept reprises de vous noyer dans la baignoire, pendant que vous preniez votre bain ?

Oui Madame la Présidente. Présentement, c’est ce qu’il a fait !

Mais alors, si je suis vos déclarations à la police, pourquoi avez-vous eu des rapports sexuels consentis avec lui quelques heures plus tard ?

Mais, Madame, j’ai fêté ma survie !!!!

Le 12…

… où le Tribunal rend son verdict dans l’affaire de violences conjugales évoquée la veille.

8 ans, fermes.

Au même moment, les médias sociaux s’agitent à propos de la Une des Inrockuptibles où s’affiche Bertrand Cantat.

On nous rappelle que Cantat le meurtrier de Marie Trintignat, Cantat l’assassin, avait été condamné en 2004 à 8 ans de prison aussi par le Tribunal de Vilnius. Cette peine, considérée par beaucoup comme trop clémente, ou pas, par d’autres, il a fini de la purger en 2010.

Depuis, chaque fois qu’il apparaît, comme sur cette couverture, le débat s’enflamme, principalement dans les médias sociaux. Tant pis s’il a été jugé, condamné, et que la peine a été exécutée et réduite en conformité de la loi, bon nombre de contempteurs bien-pensants estiment qu’il doit maintenant purger une seconde sanction, définitive celle-là : sa mort sociale. Cantat n’aurait donc plus le droit d’exercer le seul métier qu’il connaît depuis qu’il est adolescent : chanteur.

Tout ce beau monde le traite comme si l’horreur de son acte ne l’avait jamais frappée et qu’il ne regrettait rien. Qu’en savent-ils ? Ils n’ont pas lu le dossier, n’ont jamais discuté avec lui ou ses proches pour savoir si, comme le prétendent ces derniers, il y avait un Cantat avant, et après… Cela n’excuse bien sûr rien, mais il y a monstre et monstre.

Et puis il y a tous ceux pour lesquels il fait figure d’épouvantail à l’heure où la violence conjugale est à juste titre dans le collimateur des institutions. Autoriser Cantat à sortir un album, à remonter sur scène, c’est bien sûr faire injure à toutes les autres victimes de violences conjugales. Comme si la célébrité était une circonstance aggravante et que finalement, il vaut mieux laisser la cohorte d’auteurs anonymes de tels actes dans l’ombre car, montrer du doigt Pierre, Paul ou Jean, cela fera moins d’effets dans les médias.

Et, donc, on n’en revient à notre affaire de la veille. Les faits y étaient graves, sans conteste. En tant que représentant de la partie civile, nous devrions nous réjouir de ce que le Tribunal a suivi le réquisitoire du Procureur, balayant tout autre considération. Pourtant, personne n’est décédé. La vie continuera de se dérouler tranquillement pour Madame et son enfant. 8 ans, ce n’est pas rien. En 2004, à Vilnius, un Tribunal qui n’était pas particulièrement réputé pour sa mansuétude avait condamné un homme pour le meurtre de sa compagne, meurtre que personne ne pouvait vraiment expliquer, à la même peine. Juste ? Pas juste ? Allez savoir… C’est toujours 8 ans…

Le Droit, la Justice ne sont pas des longs fleuves tranquilles et la vérité (en minuscule, parce qu’elle est plurielle) d’un jour n’est pas celle de demain. Cette réalité n’est malheureusement pas toujours évidente pour le commun des mortels et a tendance à s’évanouir dès qu’il y a matière à déverser sa morale bien-pensante sur l’idole tombée de son piédestal.

Le 13… Vendredi…

… où l’on se demande si d’apposer la date du 13 sur les deux recours adressés ce jour est une bonne ou une mauvaise idée.

Croisé un chat noir ce matin, trèfles à 4 feuilles (apportées par une merveilleuse cliente il y a longtemps) dans la boîte posée sur le bureau, manque la patte de lapin (mais là, mes enfants m’en voudraient). Bon, ça devrait le faire…

Le 16…

… où, horresco referens, votre serviteur découvre atterré qu’il y aurait des loups dans la Bergerie ! Bon sang de bois, fichtre, foutre (oups, mauvais mot), mais comment cela se peut-il ?

Moi qui croyait dur comme fer que la promotion canapé était un phantasme de midinette évaporée, qu’aucune femme n’avait jamais dû subir une quelconque forme d’attention un peu trop appuyée de la part de mes congénères mâles… Il a fallu que Hollywood  m’ouvre les yeux sur les turpitudes du sieur Weinstein, stigmatisé comme le Ben Johnson  du harcèlement sexuel pour me dessiller les yeux !

Apparemment, le prude MeFaire ne devait pas être le seul naïf sur cette terre, à voir les réactions outrées de toute cette populace médiatique bien décidée tout à coup à voler au secours des victimes. Comme si elle venait juste de découvrir que certains hommes, parfois adulés, profitent de leur position depuis la nuit des temps pour obtenir des faveurs sexuelles, consenties ou non.

Si #balancetonporc ou #metoo devaient permettre d’éviter certains abus dans le futur, ok, mais j’ai comme un doute. Derrière toute chasse aux sorcières (parce que c’en est une, mondiale) se cache hypocrisie et règlement de comptes. Et, ça, c’est la porte ouverte à d’autres abus…

Le 17…

… où l’on s’en va visiter nos ouailles au pénitencier.

Ce paroissien-là attend sereinement son procès. Surtout qu’il en a parlé à ses petits camarades de jeu : « J’ai bien compris comment ça va se passer au tribunal. J’ai parlé avec un des gars qui est ici comme moi. Mais lui, c’est la 3ème fois. Alors… vous voyez, le droit, il connaît, un peu comme vous… »

Eh….

Le 18…

… où l’on apprécie le sens de l’à propos des Inrockuptibles dans cet édito publié sur le web, répondant de façon posée à ses lecteurs heurtés par sa dernière couverture (cf. le billet du 12 ci-dessus)

Extrait :

A l’époque, cette interview fit déjà polémique. Des questions qui se posent naturellement aujourd’hui furent déjà soulevées. Cantat avait-t-il le droit, après avoir tué Marie Trintignant de ses poings, à une vie publique ? Comment dissocier l’homme de l’artiste, et faut-il le faire ? En tant que journalistes, nous sommes là pour poser ces questions. Et la question que soulevait notre article consacré à Bertrand Cantat est : pourquoi et comment faire de la musique quand on a tué une femme ? Une question bien trop vertigineuse pour appeler une seule et même réponse. Une question qui, pour certains, ne mérite même pas d’être posée, qui pour d’autres suscite encore des interrogations. Le débat qui suit d’ailleurs la publication de notre interview est là pour le rappeler : rien n’est si simplement simple, rien n’est si simplement compliqué. Ce débat a largement dépassé Les Inrockuptibles. Il est désormais repris par les médias, et notamment au travers de la question de la réinsertion. Des représentants de l’Etat se sont exprimés, des citoyens, des juges aussi, dont celui qui a décidé de la libération de Bertrand Cantat.

Le 19…

… où à l’occasion d’un bon repas avec un excellent ami architecte, homme merveilleux au regard plein de bon sens sur la société en général et le monde de la construction en particulier, nous tombons d’accord sur le fait que, dans nos professions respectives, un nombre croissant de fonctionnaires… fonctionnent… un peu trop… et c’est tout.

Le 20…

… où, si l’on prend la journée en mode cinémathèque, on hésite entre Tout ça, pour ça ou Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages…

Explications.

C’est jour de plaidoiries à la Cour d’appel de la Comté. Votre serviteur y assiste un jeune homme d’origine balkanique, accusé de divers méfaits, dont un brigandage particulièrement violent contre un notable de la ville. Déjà là, ça part mal.

Les faits ne sont pas contestés. Quelques broutilles au niveau de l’application du droit, où le Tribunal de première instance s’est un peu mélangé les pinceaux. Et la peine… 5 ans.

Certes, notre paroissien n’est pas un enfant de chœur, mais ses deux comparses pour ce seul fameux brigandage n’ont pris que 2 ans. Lui reçoit donc 3 ans pour ses brillants états de service, composés de petites infractions, qui, prisent isolément, ne lui auraient valu que 6/8 mois, plus une tentative de brigandage, très soft, puisque, à peine arrivé, le patron du bistrot visé lui a arraché son fusil à pompe factice et l’a renvoyé manu militari. Pour ça aussi, l’addition séparée n’aurait pu être qu’une année au maximum.

Alors, voilà. Bien sûr, mis bout à bout, tout cela fait beaucoup et le Tribunal peut augmenter la facture finale en cas de récidive. Mais tout de même, 5 ans…

Et, surtout, le Tribunal de 1ère instance l’a relégué au rang des nuisibles, sans accorder la moindre attention à son vécu. Une seule phrase parle de son passé sur les 65 pages du jugement. Z est né en 1991 au Kosovo. Ses parents ont été tués dans la guerre en 1999. Point final.

Il faut dire que notre ami n’aide pas vraiment les gens à le comprendre. Interdiction de parler de ses parents ou de son enfance nous a-t-il dit. Pourquoi ? Il ne veut pas en parler, c’est tout. Et quand on l’interroge sur les faits, il répond de manière si détachée que les Juges l’ont immédiatement classé dans la catégorie « hermétique à la repentance ». Quand, il répond.

Monsieur avez-vous quelque chose à dire pour la Cour en conclusion des débats ?

Non…

Juste avant le début de la séance, je lui dit qu’il y aura des étudiants en droit venus assister aux débats, comme c’est souvent le cas. Il blêmit. Oh non, j’espère qu’il n’y aura pas ma nièce. Elle étudie justement le droit ici. Je ne voudrais pas qu’elle voit ça… Je me dis que c’est quand même peu probable vu le nombre d’étudiants.

Perdu. Elle est là, avec un paquet de friandises pour lui. Que, bien sûr, les matons ne lui permettront pas de faire passer. Le règlement, c’est le règlement !

Nous plaidons.

En appel pénal, le condamné qui fait recours plaide en premier, puis Le Procureur. C’est l’inverse de la première instance. Comme la défense n’est pas obligée de motiver précisément ses moyens avant la séance, ça confère un petit avantage sur le Parquet qui découvre au fur et à mesure l’argumentation. Mais, aujourd’hui, le Procureur a un dossier en béton et, surtout, un notable lâchement attaqué comme missile thermo-nucléaire. C’est bien mieux qu’une vulgaire agression à la sortie d’une boîte entre fêtards avinés, même si le résultat est exactement le même. Donc, il a déjà préparé ses références aux épisodes les plus trash, certains de pouvoir les placer, et s’en donne à cœur joie le moment venu. Surtout qu’il a la parole en dernier et sait que je ne peux répliquer à certains arguments en dessous de la ceinture. C’est de bonne guerre, même si l’honnêteté intellectuelle n’est pas vraiment au rendez-vous. D’ailleurs, dans sa péroraison, il se tourne vers moi et martèle son pupitre un sourire sardonique aux lèvres. Il sait que la Cour a tout, sauf envie de me donner ne serait-ce qu’un tout petit peu raison.

Et il a raison le bougre !

La Cour rend son verdict. L’appel est partiellement admis (ô joie!). Les arguments techniques admis. Mais la peine reste la même, 60 mois (et boum, touché coulé !).

PS : au-delà du fait qu’il ne fallait pas être grand clerc pour se douter que nos chances de succès étaient infimes, ce genre de jugement de Salomon à deux balles agace profondément. La peine, Z. la méritait peut-être. Là n’était toutefois pas le débat. On ne demande pas aux Juges d’appel, qui sont les gardiens du droit, de dire s’ils auraient prononcé la même peine que leurs prédécesseurs de première instance, juges du fait. Non, ils sont là pour dire si le jugement qu’on leur soumet a été rendu en application du droit et de la jurisprudence. Et ces deux-là disent qu’il faut motiver la peine en tenant compte de toutes les circonstances. C’était justement là que le bât blessait… De circonstances, on n’a voulu retenir que celles qui correspondaient à l’image qu’on voulait donner de l’accusé, un individu dépersonnalisé, mû uniquement par le goût de la violence gratuite et le plaisir de transgresser les lois dixit le Tribunal. Sauf qu’une telle perversion doit être constatée au travers d’une expertise psychiatrique, laquelle fait justement défaut dans ce dossier…

Le 23…

… où, lorsque ce lundi après-midi, on fait le point au téléphone avec le client condamné à 5 ans le vendredi précédent (voir le 20 ci-dessus), on se rend compte que ses matons ne lui ont toujours pas transmis le fax envoyé vendredi en fin de journée !

Bien sûr, ce n’était rien d’important. Juste le verdict de la Cour, concernant son appel, rejeté avec la confirmation de sa peine de prison…

Un détenu est privé de ses droits, y compris celui de recevoir son courrier…

Le 24…

… où c’est une journée étrange.

D’abord, ce rêve de fin de nuit. Mon client condamné à 5 ans en train d’inscrire sur le mur de sa cellule le nombre de jours de détention. Mais, à la place de tracer des ΙΙΙ, il dessine des pots de yaourts…

Et puis, cette mélodie qui n’en finit pas de trotter dans la tête Psycho Killer, Qu’est-ce que c’est ?

C’est grave docteur ?

Le 25…

… où l’on passe une journée gratifiante à chercher la Voie en lisant des tonnes de jurisprudence.

Et ? Rien… nada… que pouic.

Fruuuuustration…

Le 26…

… où, en guise de conclusion, après plus de 3 heures de négociation ardue, on évoque l’attitude plus que déconcertante d’un fiduciaire qui a mis tout le monde dans la panade. Bon, ce triste sire a au moins le mérite de mettre les deux parties d’accord sur une envie commune de lui tordre le cou.

Le moment semblait bien choisi pour faire un clin d’œil à l’ami Audiard, qui n’aurait pas manqué de l’épingler, ce fiduciaire improbable :

Les cons, ça ose tout, c’est…

… d’ailleurs à ça qu’on les reconnaît termine dans mon dos la partie adverse.

Si on a les même références, on va peut-être réussir à se mettre d’accord…

Le 27…

… où l’on prend connaissance avec intérêt de la prose d’un tribunal zurichois qui se penche sur la punissabilité de l’auteur d’un retweet.

Nos amis du Limmat quai qualifie Twitter, à l’instar d’autres réseaux sociaux tels que Facebook et Google+ de médias au sens de l’art. 28 al. 1 CP qui traite de leur punissabilité. Le retweet, c’est-à-dire la propagation de propos tenus par un autre usager de Twitter (tweet), alors qu’il peut être lus tant par des usagers de Twitter que par des utilisateurs d’internet ne possédant pas de compte Twitter, constitue pour eux une publication au sens de cette disposition du Code pénal, du moins lorsque l’auteur du retweet dispose sur Twitter de plusieurs personnes qui le suivent (followers). L’article de loi en question privilégie la propagation de propos au sein de la chaîne de diffusion du média. Les retweets interviennent dans cette chaîne typiquement propre au média qu’est Twitter, ce qui implique que seul l’auteur du tweet initial est punissable. L’auteur du retweet ne peut pas non plus être qualifié de rédacteur responsable ou de personne responsable de la publication au sens du Code.

Moralité : si vous retweetez des insanités racistes ou attentatoires à l’honneur d’une tiers vous ne risqueriez rien, à Zurich du moins, ce qui doit rassurer tous ces parangons de vertus si prompts à déverser leur fiel sur leur semblable.

Cette jurisprudence, dont je n’ai pas tout le détail, semble oublier une chose. La culpabilité en droit pénal ne se détermine pas avec comme point de départ le résultat, mais en partant de ce que l’auteur voulait faire ou a pris plus ou moins consciemment le risque de faire. Donc, si on retweete un post incitant à la haine raciale contre untel, en regrettant de ne pas être l’auteur initial et d’avoir eu l’idée avant lui, parce qu’on serait 100% d’accord, il y a conscience et volonté, soit deux composantes essentielles de la punissabilité…

Voilà donc le sujet de réflexion de cette fin de semaine pour l’avocat suisse qui suit sur Twitter les posts rageurs, outrés, intégristes, islamophobes, brefs, à propos de l’affaire #Merah (voir aussi #Plaidoiries). Il y aurait de quoi faire.

Le 30…

… où l’on rencontre les différents membres d’une hoirie, leur notaire et celui qui veille consciencieusement à leurs intérêts depuis des lustres.

La salle de conférence est pleine à craquer, voilà qui n’est déjà pas habituel. Mais ce qui retient l’attention, c’est la présence du petit-fils de la défunte, que votre serviteur rencontre pour la première fois.

D’abord, il n’a rien de petit. Au contraire, beau gabarit. Eh puis, ce garçon qui intervient dans cette affaire, assisté d’un curateur, parce qu’il est dans la détresse financière depuis un bail, on s’en était fait une idée préconçue. Au service social à son âge, c’est forcément le jeune qui n’en plante pas une, qui se fiche de tout, pourvu que le service social paie ses factures et qu’il puisse zoner tranquille. Bref, pas une référence…

Eh bien pas du tout. Bien mis, clair dans ses propos, conscient de la situation, respectueux à l’égard des membres de sa famille, critique -à bon escient – sur les aléas de la procédure de liquidation de la succession. Bref, une bonne surprise.

Et une bonne leçon.

On le reproche assez souvent aux Juges, mais l’avocat doit aussi s’abstenir de juger son prochain sur dossier et, surtout, sans connaître tous les paramètres de la situation. Sinon, c’est la plantée assurée…

Le 31…

… où l’on se demande si, on ne devrait pas se mettre en mode Halloween et envoyer certains courriers en remplaçant la formule usuelle de politesse par Trick or Treat !

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