Mars…
… où je me dit que le temps file plus vite que les délais que je me suis engagé à respecter.
Le 3…
… où je retrouve une cliente rencontrée le mois passé. Au premier abord, elle paraissait un brin agitée, mais je m’étais engagé à éclaircir certains points pour savoir si je pouvais l’aider. Fin des investigations aujourd’hui, non seulement elle hallucine, mais elle ne veut rien entendre. Pas moyen d’en placer une. Rien d’étonnant, compte tenu du verdict de la Faculté : bipolaire, un brin parano et j’en passe. Maître, ma sœur s’introduit chez moi la nuit pour déplacer mes affaires et me voler mes factures… Eh bien, changez les serrures… Je l’ai fait, mais elle entre quand même quand je ne suis pas là et quand je dors. Elle m’a même coupé les cheveux dans mon sommeil. Regardez ce massacre, jamais je ne coiffe comme ça… Ah ouais, vu comme ça…
Comment lui faire entendre raison, alors qu’elle en est privé ? Elle veut que j’écrive, à sa sœur et à sa cousine pour qu’elles arrêtent de venir l’embêter la nuit. 1 heure pour la dissuader. Finalement, elle arrive à ce constat : les avocats sont comme les Juges, ils ne veulent pas se mouiller dans les affaires de famille. Elle me quitte pas trop fâchée, mais toujours persuadée d’être sous surveillance. J’aurais peut-être dû orienter ses soupçons sur la NSA, histoire de faire diversion ?
Le 6…
… où l’on entend des phrases merveilleuses dans la bouche d’un Président de 1ère instance. Obligé de statuer en urgence, pour une question forcément… urgente, il a dégagé en corner. En plus, en lisant sa décision rendue en… urgence, il était manifeste qu’il avait survolé la demande et n’avait surtout pas lu les pièces l’accompagnant ! Et là, en audience, il nous lâche : Si les avocats embêtent les Juges avec des requêtes d’urgence, il est normal que les Juges embêtent les avocats avec des délais. En clair, vous m’avez fait travailler, donc je me venge en vous collant des délais contraignants. On se demande pourquoi ces gens sont payés ? Dès qu’une demande fait plus de 4 pages, on sent qu’ils cherchent par tous les moyens à se débarrasser du dossier.
Le brave magistrat – ah non, un magistrat est quelqu’un qui sait qu’il va devoir travailler, un peu – donc ce digne représentant de la fonction judiciaire, pour lequel nous payons des impôts, se fend encore d’une de ses saillies dont il a le secret en fin d’audience (3h30 de négociations pour arriver à une convention réglant la poursuite d’un chantier sur un terrain que se dispute deux familles). Eh bien, heureusement que l’on a trouvé une solution, sinon cela aurait été dommage pour les corps de métier concernés, qui sont tout de même des entreprises locales ! Donc, nos clients français, qui sont les propriétaires du terrain, s’ils se ramassent, tant pis pour eux. Ils ne sont pas d’ici.
Scorie des dernières votations sur l’immigration ou esprit de clocher ?
Le 10…
… où l’on découvre qu’il est difficile d’expliquer au propriétaire d’un immeuble qu’il ne peut y entrer comme ça, sans crier gare, juste pour s’assurer que son cuistre de locataire, à qui il a prêté 15’000.- francs, qu’il n’a bien sûr pas rendu, et qui, en prime, ne paie plus son loyer depuis 6 mois, a bel et bien mis les voiles… S’il est encore là, c’est une violation de domicile et vous allez avoir des ennuis s’il porte plainte…Vous vous foutez de moi Maître ? Il me doit un saladier et c’est moi qui vais avoir des ennuis ?… Ne vous énervez pas… Et combien pensez-vous que vous allez pouvoir récupérer de tout cet argent ? Là, il va vraiment s’énerver…
Le 11…
…où je commence à lire les notes de plaidoirie d’un réquisitoire du Ministère public, en vue d’un recours que je n’ai pas encore rédigé, parce que le jugement n’a pas encore été notifié (et bien malin qui sait quand il le sera)… à 22h30… et, après, on s’étonne de mal dormir…
Le 12…
… où je découvre que ma secrétaire a envoyé les 4 exemplaires de mes notes de plaidoirie au client, alors qu’un seul suffisait. Restons calme, car la vraie question est : mais qu’est-ce qu’elle a bien pu mettre dans les trois autres enveloppes (destinées au Tribunal, au Confrère adverse et à l’assurance) ? Restons calme, on respire…
Le 14…
… où le recours qui devait se réduire à l’essentiel, soit 7 ou 8 pages maximum, s’est transformé en une hydre de 19 pages !
Le 16…
…où je suis désormais suivi par Sœur Bismuth, alias Sœur Marijuana ! Done !
Le 18…
… où le TPF me demande de produire une procuration pour justifier que je suis bien l’avocat de la personne au nom de qui j’ai écrit. Pendant des semaines, ils ont vu ma bobine au côté de mon client, toutes leurs communications me mentionnent comme conseil du prévenu. Stupidité insondable ou formalisme excessif, je me demande…
Le 20…
… où j’explique à un Procureur que ce qu’il écrit ne trouve aucun soutien dans le dossier (à ce stade, on peut affirmer qu’il existe des indices suffisants que…). Il ne me croit pas. Étrange…
Le 21…
… où une hirondelle ne fait pas le printemps, surtout quand il faut envoyer à 16h30, à la demande expresse du client un fax à l’OFJ pour stopper la prose du Procureur de la veille. Dire qu’il n’y aura certainement personne à cette heure-ci un vendredi pour lire ce fax. Sob !
Le 24…
… où l’on découvre toutes les erreurs commises en plaidoirie depuis toutes ces années. Aïe aïe aïe, suis-je aussi transparent ?
Le 25…
… où, parmi le courrier, une enveloppe contenant une photocopie d’un article de presse parlant, photo à l’appui, de Jan Palach, en flammes. Lettre anonyme ? Pas tout à fait, un post it collé dessus, avec écrit à la main « un cri du cœur » et 3 lettres pour signature. Aucune idée de l’auteur. Comment faut-il le prendre ? Mystère… Si cela part d’une bonne intention, force est de constater que certaines personnes surestiment mes capacités déductives. Sinon, même constat !
Le 26…
… où je rencontre un client qui pose des cheminées et qui me dit : Attention, faut pas me prendre pour un fumiste ! Loin de moi cette idée, cher Monsieur.
Le 27…
… où le client qui devait apporter quelques justificatifs de frais généraux débarque avec un carton contenant 5 classeurs fédéraux et des liasses de documents. Comme je n’étais pas sur, j’ai tout pris… Vous voulez garder le tout ? Non, ça ira. Juste une copie de ces 3 factures.
Le 31…
… où la semaine commence bien. Jugement du Tribunal de Perpète-les-Oies. L’action de la partie adverse est partiellement admise. Bon, ça part mal, mais on remonte bien vite la pente. Après 6 ans de procédure, notre client doit luit verser la somme astronomique de… 1’500.- francs. Là, ça devient intéressant, parce que tous les frais de justice sont mis à la charge de la partie adverse demanderesse. Normal, elle n’obtient que 20% de ses conclusions. En prime, elle doit prendre à sa charge 2/3 de mes frais ! Moralité : on perd un peu. On ne paie rien et on reçoit même des sous. J’imagine le bonheur en face. A vue de nez, honoraires de son avocat, plus frais de justice, plus 2/3 des honoraires de bibi, allez, à la louche : 20’000.- Pour en récupérer 1’500. Bon ratio, y a pas à dire
Un avocat, donc un indépendant, qui paie des impôts ? Vous ne devez pas être fiscaliste…. 🙂
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Je ne peux quand même pas cumuler toutes les tares de ma profession ?
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