June…

… où la météo n’a rien de folichon. Température morose, pluviométrie digne d’un déluge biblique. D’habitude, le mois de la déesse Junon commençait sous de meilleurs auspices. Difficile de se mettre au diapason du calendrier, où les vacances scolaires – qui riment avec féries judiciaires – approchent sournoisement, ce qui induit toujours un supplément de stress dans les boutiques d’avocat. Sinon, pendant ce temps-là, sur la TSF, we’re still Looking for the summer

Le 3…

… où c’est une réalité, les faits mis en lumière une procédure pénale ne sont que la pointe de l’iceberg.

Du côté de l’accusé, c’est le travail de son avocat de faire ressortir ce qui est sous la surface, ces fameuses « circonstances atténuantes » qui constituent souvent son seul fonds de commerce au moment de plaider, la qualification juridique de l’infraction ne posant souvent pas de problèmes particuliers.

Du côté de la victime, la situation est encore la même. Prenons le cas de cette cliente, avec laquelle nous commençons à préparer une comparution encore lointaine, mais son besoin d’être rassurée est déjà très présent. Elle a été accusée par celui qui va passer devant le juge d’avoir forcé de jeune hommes à coucher avec elle, en échange d’avantages « juridiques ».

Mère de famille au privé, responsable de formation au travail, elle a vécu durement ces accusations pendant l’instruction, avant d’être blanchie par le Procureur. Elles ont en effet été largement diffusées dans le cercle professionnel, puis familial. Cela laisse des traces, même si son employeur lui avait d’emblée assuré son soutien.

Et ces traces, se sont justement les dizaines de mètres de glace enfouies sous la surface. Elles seules permettront de justifier son droit de réclamer un tort moral à son détracteur.

Mais pour mesurer ce dommage et son juste « prix », il faudra bien accepter de faire au minimum un petit peu de snorkeling. Facile à dire, mais, dans le réalité, on peut se heurter à plusieurs difficultés, dont la plus frustrante parfois est l’absence de réelle motivation du Tribunal de vouloir mettre un masque et un tuba pour explorer ce que dissimule les flots.

Aujourd’hui, la Justice veut souvent sacrifier ce qu’elle croit être de l’efficacité à l’écoute nécessaire qu’elle doit octroyer à tous les justiciables. L’accusé certes, dont le sort dépend d’elle, mais aussi les autres intervenants. Les victimes n’arrivent pas au tribunal avec des stigmates bien visibles. Elles doivent les expliquer, exercice difficile et inconfortable. La qualité d’écoute du Juge est ici une vertu cardinale.

Dans ce dossier, le Juge qui devait présider aux débats a envoyé la citation à comparaître, mais sera à la retraite lors de l’audience fixée vers la fin de l’automne. Qui le remplacera ? Mystère.

Pour l’avocat, peu importe, le cadre de son intervention, ses prérogatives et ses contraintes, restent les mêmes. Mais cette information peut l’aider à mieux préparer sa cliente en fonction l’expérience du magistrat auquel elle devra répondre. Certains ont un sens de l’écoute innée. D’autres, il faudra les amener sur notre terrain, sans les brusquer. Car n’oublions que l’intervention de la partie plaignante au procès pénal est soumise aux règles de la procédure civile en ce qui concerne l’établissement des faits sur lesquelles elle entend fonder ses prétentions. Donc, il faut exposer ces faits au Juge, les détailler, les remettre dans leur contexte, etc… Bref, tout un travail de fond que le Tribunal doit (aussi) avoir la patience de laisser faire…

PS : billet écrit avec en toile de fond sonore, le merveilleux Cris Rea et son concert de 2017 lors des Baloise Session. Stony Road un titre évocateur

Le 13…

… où on savait que les policiers aiment cuisiner les prévenus, mais pas qu’ils s’accommodaient parfois aussi avec les esprits.

Le site de nos voisins hexagonaux, Actu-juridique.fr relate une amusante d’histoire de fonctionnaire de police, affectée nuitamment à surveiller les gardés à vue du Palais de justice ayant besoin de soins médicaux ; ainsi que « d’organiser l’accueil des malades, des infirmières, des visiteurs et des avocats à l’hôpital de l’Hôtel-Dieu ».

On apprend que cette brave dame, a profité des ténèbres des pas-perdus pour invoquer les esprits. Lesquels ? Mystère.

Le chroniqueur de l’étrange, Raphaël Costa, doctorant en droit de l’espace, enseignant à l’Université Paris-Saclay et fondateur du site Curiosités Juridiques – jolie carte de visite- nous apprend que l’employeur sans doute trop cartésien à considéré que faire tourner les tables ne faisait pas partie du cahier des charges et a licencié la spirite, avant que la Cour d’appel, semblerait-il plus ouverte sur les questions occultes, admette que le licenciement était injustifié.

Elle réhabilite donc la policière et, au passage les esprits des patients décédés de l’Hôtel-Dieu, car, selon les considérants les séances de spiritismes n’ont pas nui de manière significative au bon fonctionnement du service ni compromis les missions des fonctionnaires de police présents, et la salle où ont eu lieu les séances est un lieu fermé, inaccessible au public, et que dès lors la pratique, inconnue à l’extérieur de la salle, n’a pas pu nuire à l’image de l’institution policière… !

Bref, une jolie histoire de fantômes que l’on peut lire ici et qui démontre que le droit n’est pas si terre-à-terre qu’on croit. Une cause que l’on aurait volontiers défendue…

Le 14…

… où la Cour Européenne (Cour EDH), bien critiquée ces temps-ci sous la coupole, vient de relever dans un récent arrêt les remparts de la défense, devant les juridictions nationales trop souvent castratrices avec les privilèges de la profession d’avocat.

L’histoire de base, soit l’enquête sur les trafic d’influence qui minent le Rocher depuis quelques temps, n’a pas grande importance dans le propos de ce billet. Ce qui nous intéresse, c’est le fond procédurale, soit l’extraction massive et l’exploitation des données du téléphone portable de l’avocat du prévenu dans le cadre de l’instruction est-elle licite ?

La réponse est : non ! La Cour EDH confirme qu’il s’agit bien d’une violation du secret professionnel de l’avocat, basée sur le l’art. 8 de Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), qui dit en substance que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance et qu’il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

Selon la Cour, l’expertise de l’intégralité du contenu du téléphone portable d’une avocate ordonnée par un juge d’instruction hors du cadre de sa saisine tombe sous le coup de cette disposition. Ce d’autant que l’avocat avait dans ce cas précis spontanément remis son téléphone pour prouver sa bonne foi, sous réserve de l’effacement préalable de données.

Sauf que l’autorité d’instruction avait délibérément ordonnée ensuite une recherche extensive et complète du contenu, accessible et caché, du téléphone utilisé à titre personnel et professionnel. [NB : c’est ici l’occasion de rappeler que vous pouvez effacer des fichiers, des liens, etc. sur vos téléphones cellulaires, PC, tablettes, etc., il en restera TOUJOURS une trace !]

Pour Strasbourg, cette mesure d’instruction est une atteinte au respect de la vie privée et de la correspondance de l’avocat, assimilable à des perquisitions ou des saisies. Elle a pointé l’absence de recours effectif aux dispositions instaurant un régime protecteur pour l’avocat au niveau national et l’insuffisance de contrôle correct par les autorités judiciaires des contours admissibles de l’instruction étendus de manière trop large par le juge d’instruction, ainsi que le défaut de prise en compte des garanties procédurales dues au respect du secret professionnel de l’avocat.

Le premier fautif est le juge d’instruction, qui a triché et trompé l’avocat, ou qui a couvert les policiers qui ont procédé de la sorte. Peu importe, les autorités de recours auraient dû faire leur boulot. Les articles de la CEDH ne servent pas à faire de la politique climatique, mais à protéger l’individu contre les ingérences étatiques.

Certes, nous avons égaré les juges d’instruction (JI) dans la révision de notre droit de procédure et cette affaire concerne de surcroît la Principauté, terre économique si éloignée de nos monts. Cela ne nous regarde pas diront certains, notamment ceux qui ont pris en grippe les juges européens depuis le début du printemps.

Eh bien si, cela nous concerne aussi :

-parce que le Procureur qui a remplacé chez nous le JI ne réfléchit pas différemment que son prédécesseur dont il a hérité de la casquette;

-parce que les Ministères publics cantonaux ou fédéraux n’encouragent pas précisément dans leur culture d’entreprise le respect des droits de la défense quand cela va à l’encontre de leurs idées souvent préconçues;

-parce que ces affaires médiatiques, même étrangères, donnent des idées à nos pandores locaux qui se sentent pousser des ailes à ignorer un pan essentiel de la démocratie, le respect de la confidentialité des échanges entre un avocat et son client, s’il se dresse en travers du chemin de leur enquête;

-parce que dans notre pays le droit du citoyen à être défendu dans le respect des garanties légales est régulièrement contesté la masse bêlante de politiciens populistes qui n’ont pas lu Bukowski (I guess the only time when people think about injustice is when it happens to them).

Le 21…

… où c’est le solstice paraît-il. Mais, on voit pas bien le jour le plus long, pcq ce matin, à 5h15, le ciel est noir comme le plomb et se met à déverser des sceaux de flotte sur ma terrasse.

Cela dit, c’est une de ces journées classiques de juste avant des vacances.

Il y a les échéances connues, qu’on gère comme on peut en identifiant ce qui peut être repoussé ou pas.

Et puis les grands classiques. Ceux dont on attend des nouvelles depuis des semaines et qui semblent s’être donnés le mot. Rien de nouveau sous le soleil, pardon sous la pluie, donc. Juste ce petit surcroît d’énergie, parce qu’on sait la quille proche.

Mais bon, il pourrait quand même arrêter de pleuvoir, parce que je ne sais ni chanter ni danser…

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