Amis footballeurs retenez bien ceci…
03/27/2019 § 1 commentaire
Extraits du Journal @MeFaire, des 21…
…. où l’hirondelle ne fait toujours pas le printemps, malgré un soleil radieux, surtout quand on prend un gros coup sur la cafetière comme ce matin, en recevant la notification de l’arrêt du Tribunal fédéral rejetant notre recours concernant ce jeune footballeur accusé de lésions corporelles par négligence pour avoir blessé son adversaire, alors qu’il essayait de lui subtiliser le ballon par un tacle.
On n’en reparlera, lorsque l’on aura pu retrouver un peu de cette sérénité que l’on dit nécessaire à l’exercice mesuré de notre profession, sérénité sérieusement mise à mal à la lecture des considérants de ces Juges qui sont soi-disant le dernier rempart contre l’arbitraire et qui ont le devoir de garantir une certaine cohérence du système légal…
et 22 Mars…
… où l’on a passé une bonne partie de la nuit à ressasser cette affaire de footballeur cloué au pilori de la justice pour avoir simplement voulu prendre la balle à son adversaire et aller marquer un but. Et, c’est juré, craché, nous ne sommes pas en train de minimiser. C’est exactement ce qui s’est passé, confirmé par l’arbitre. Certes, blessure – sérieuse – il y a eu, mais le tacle n’avait d’autre vocation que de subtiliser la balle à l’adversaire.
Dans ce métier, on ressasse, on ressasse, on ressasse souvent en se demandant où est-ce qu’on a bien pu se planter ? Par ce que c’est seulement à la télé que les avocats gagnent tous leurs procès. Dans la vraie vie, on sait que l’on perd des dossiers, souvent même, mais cette expérience nous aide à mieux conseiller le client, à l’inciter à éviter les tribunaux, zone improbable où, comme disait mon défunt maître de stage, c’est la Cour des Miracles. Et le Tribunal fédéral est la plus improbable des Cours des Miracles. Aujourd’hui, il faut être inconscient pour s’y risquer la fleur au fusil.
Sauf que, parfois, on n’a pas le choix, comme c’était le cas dans ce dossier. Donc, pour en revenir à la question existentielle de base : où est-ce que l’on a bien pu se planter ? Hein, où ça, bon sang de bois… Quoique… Quand on relit les considérants du Tribunal fédéral (TF), on a pourtant l’impression que nous avions tout juste, ou, en tous cas, largement pas tout faux, puisque ses juges reprennent tous les points du dossier que nous avions soulevés et leur donne la même interprétation, mais…
Il y a toujours un « mais » et celui-ci se trouve dans le considérant 2.5.
Pourtant, avant de nous asséner le coup de grâce, les caïques du droit suisse rappelaient une évidence, que nous martelions depuis le début de la procédure. S’agissant de lésions corporelles infligées lors d’une rencontre sportive, le comportement accepté tacitement par le lésé et le devoir de prudence de l’auteur se déterminent en fonction des règles de jeu applicables et du principe général « neminem laedere ». Les règles du jeu servent en effet notamment à empêcher les accidents et à protéger les joueurs. Lorsqu’une règle visant à protéger les joueurs est volontairement ou grossièrement violée, on ne peut admettre l’existence d’un consentement tacite concernant le risque de lésion corporelle inhérent à l’activité sportive (ATF 134 IV 26 consid. 3.2.4 p. 29; 121 IV 249 consid. 3 et 4 p. 252 ss; 109 IV 102 consid. 2 p. 105 s.). Plus une règle visant à protéger l’intégrité corporelle du joueur est violée gravement, moins on pourra parler de la concrétisation d’un risque inhérent au jeu et plus une responsabilité pénale du joueur devra être envisagée (ATF 134 IV 26 consid. 3.2.5 p. 31). Sauf que, ce jour-là, personne n’a parlé de violation grave. Elle est synonyme de faute contre le jeu et sanctionnée par un carton rouge. Or, là, c’est un carton jaune qui a été donné, pour une faute jugée « dans le cour du jeu », un tacle avec un pied levé à 10/15 cm du sol. Certes qualifiée de jeu « dangereux » dans le rapport d’arbitre, mais c’est le terme du règlement sportif et il avait bien précisé que le but évident du joueur fautif était de prendre le ballon dans les pieds de l’adversaire, qu’il était en retard, mais pas tant que ça. Donc, nous sommes très loin de la violation grave qui implique un manque de scrupule de la part de l’auteur.
Et c’est bien de ça dont il s’agissait, ce que les juges fédéraux ont bien vu : La cour cantonale a exposé qu’en application des règles du jeu, l’arbitre avait estimé que le tacle effectué par le recourant relevait de l’imprudence et l’avait sanctionné par un carton jaune. Selon l’appréciation de l’arbitre, on ne se trouvait donc pas dans une situation où l’auteur du tacle aurait agi en faisant un usage excessif de la force ou aurait commis une faute grossière, soit une faute violente ou brutale, geste qui aurait été sanctionné par une exclusion.
Et c’est ainsi que l’on arrive à ce considérant 2.5, où tout part en cacahuète, les juges fédéraux considérant que, si le rapport d’arbitre dit « jeu dangereux », c’est n’est pas seulement dangereux dans la terminologie footballistique, mais aussi au sens du droit pénal, donc punissable. Alors qu’il suggère qu’il faut de garder de faire des parallèles entre les deux systèmes de normes. En l’espèce, le recourant ne conteste pas avoir violé une règle de jeu en taclant l’intimé, ni que la règle en question vise notamment à protéger les joueurs. Par ailleurs, la cour cantonale a retenu, d’une manière qui lie le Tribunal fédéral (cf. art. 105 al. 1 LTF), que le recourant n’avait pas eu l’intention – même par dol éventuel – de blesser l’intimé, mais avait agi par négligence. Il convient donc de déterminer si la violation de la règle de jeu en question a été suffisamment grave pour exclure un consentement tacite de l’intimé concernant le risque de lésion corporelle inhérent à la pratique du football. A cet égard, contrairement à ce que suggère le recourant, on ne saurait calquer les limites déterminantes pour le droit pénal sur le système de sanctions et d’avertissements découlant des règles du jeu. La violation grossière d’une règle de jeu, au sens de la jurisprudence, ne peut être sans autre assimilée ou circonscrite à la « faute grossière » donnant lieu à une exclusion, puisque les règles du jeu ne sont pas arrêtées en fonction de considérations pénales. En outre, une faute susceptible de donner lieu à un avertissement peut, selon les règles du jeu, être commise par le joueur qui agit sans tenir compte du caractère dangereux ou des conséquences de son acte pour son adversaire, comportement pour lequel on ne peut exclure, a priori, une application du droit pénal. Enfin, un parallèle systématique entre la définition de la violation grossière des règles du jeu permettant d’envisager une sanction pénale et la « faute grossière » définie par ces règles reviendrait à exclure – contrairement aux exigences jurisprudentielles en la matière (cf. consid. 2.2 supra) – le principe général « neminem laedere » de la réflexion juridique.
En l’occurrence, le tacle litigieux a été effectué jambe tendue à 10 à 15 cm du sol et a été qualifié de « dangereux » par l’arbitre, appréciation par la suite reprise à son compte par le recourant. L’arbitre a confirmé que, selon lui, le geste litigieux relevait de l' »imprudence » au sens des règles du jeu, soit d’une attitude par laquelle le joueur ne tient pas compte du caractère dangereux ou des conséquences de son acte pour son adversaire. Partant, il n’est pas décisif que le recourant n’eût pas commis un geste susceptible d’être sanctionné par une exclusion, mais seulement par un avertissement. L’intimé, en participant à la rencontre, a accepté tacitement les risques inhérents à la pratique du football, ce qui ne couvre pas les comportements dangereux adoptés par les autres joueurs. Autrement dit, indépendamment de la question de la sanction – avertissement ou exclusion – prévue par les règles du jeu, on ne saurait considérer que les joueurs consentent à subir des lésions causées par des comportements dangereux – soit qui risquent notamment de provoquer des blessures – adoptés en violation desdites règles par d’autres joueurs. Compte tenu de la dangerosité du tacle pratiqué par le recourant, jambe surélevée du sol, la violation de la règle de jeu visant à protéger les autres joueurs peut être qualifiée de grave. Au regard des règles du jeu et du principe général « neminem laedere », il convient donc de considérer que le recourant a violé son devoir de prudence, de sorte que l’intéressé ne peut se prévaloir, à cet égard, du principe « volenti non fit iniuria ». La violation du devoir de prudence était fautive, puisque le recourant a procédé au tacle litigieux sans égard pour les conséquences – et en particulier les lésions – qui pourraient en résulter pour l’intimé.
Donc, amis footballeurs, retenez bien ceci. Selon des gens à qui l’on a donné le pouvoir de juger entre le Bien et le Mal, et qui n’ont probablement jamais chaussé de crampons de leur vie il n’est plus besoin de cartons rouges, ou même jaunes, pour se retrouver dans la ligne de mire du droit pénal. Vous étiez venus faire du sport, mais vous avez commis une imprudence et votre adversaire a été blessé. Et peu importe que cet adversaire sache qu’en pratiquant telle ou telle sport on risque une blessure. Comme il n’est pas venu pour ça, vous êtes fautif pénalement, même si l’arbitre n’y a rien trouvé à redire…
Les juges fédéraux trouvent systématiquement une astuce pour rejeter les recours. Il faudrait les remplacer par des jurys de citoyens …
J’ai écrit il y a quelques jours au Tribuna fédéral pour que les juges ayant traité mes recours remplissent et signent une déclaration de transparence, mais le TF a refusé ma demande ! A quoi servent les lois suisses si elles ne sont pas appliquées grâce à des astuces ?
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